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Introduction
Introduction
Le grand public comme on l'appelle se laisse assez facilement manipuler, ce dont la publicité et les politiciens profitent bien. Dans le domaine scientifique, ce n'est guère différent. Ainsi, Monsieur Tout le monde a subi un lavage de cerveau intense de la part de ceux qui n'ont ni Dieu ni maître. Ils carillonnent haut et fort que les découvertes scientifiques jettent un discrédit sur le contenu des Textes Sacrés. Mais lorsqu'on y regarde de plus près, leurs affirmations sont en réalité des théories qui ont du mal à résister aux faits vérifiables sur le terrain. L'archéologie et tout ce qu'on a pu découvrir sur l'histoire de l'humanité font toujours pencher la balance en faveur des Écritures.
À l'époque d'Esdras et de Néhémie, dans la ville d'Éléphantine en Haute-Égypte se trouvait une communauté juive prospère. Bien qu'elle ait disparu, il en reste des traces, dont des papyrus qui se sont révélés très précieux pour les archéologues. Ainsi, une lettre datant de 408 av. J-C confirme que Néhémie était bien un haut fonctionnaire attaché à la cour d'Artaxerxès, souverain perse qui régna de l'an 465 à 425 av. J-C. Si cet Israélite avait été choisi comme conseiller de l'empereur, il ne fait aucun doute que c'est parce qu'il était à la fois sage et discret, honnête et un homme sur qui on pouvait compter.
Alors qu'il est au service de son souverain, il est très inquiet du sort de Jérusalem qui n'est rien d'autre qu'une province du vaste empire. De plus, la Palestine est occupée par les descendants des peuplades qui y habitaient déjà avant sa conquête par les Hébreux. Tout est donc à recommencer ou presque. C'est vrai qu'Esdras avait déjà reconstruit le Temple, mais l'enceinte de la ville de Jérusalem était toujours en ruine. Néhémie demande alors et obtient l'autorisation de s'y rendre pour la remettre en état de façon à ce qu'elle redevienne la capitale viable de la Judée. Dans l'esprit de Néhémie, cette action ne vise pas à rétablir la souveraineté de l'ancien royaume de Juda, mais c'est bien plutôt un acte cultuel. En effet, il veut reconstruire et repeupler cette ville parce qu'elle est sainte, ayant été choisie par l'Éternel pour y établir son nom.
Au total, Néhémie restera une douzaine d'années comme gouverneur du district de Juda, un temps relativement court, mais qu'il sut mettre à profit au point où ses nombreux accomplissements donnent le vertige. C'était un vrai homme d'action, déterminé, et qui ne se laissait ni intimider, ni distraire de ses objectifs par ses adversaires, comme le montre le passage suivant:
Je leur envoyai des messagers pour leur répondre:? J'ai un grand travail à exécuter et il m'est impossible de me rendre auprès de vous. Je n'ai pas de raison d'interrompre l'ouvrage en l'abandonnant pour aller vous rencontrer (Néhémie 6.3).
Dès son arrivée à Jérusalem, Néhémie inspecta ce qu'il restait des remparts de la ville puis organisa les travaux de réfection. Cependant, ce ne fut pas une tâche aisée, car il dut faire face à l'opposition virulente des peuplades environnantes qui voyaient ces travaux d'un très mauvais oeil. Les bâtisseurs durent littéralement tenir la truelle d'une main et l'épée de l'autre. De plus, Néhémie aura lui-même un contrat sur sa tête, étant l'objet d'un complot destiné à le supprimer. Ses adversaires étaient d'autant plus dangereux qu'ils comptaient des alliés au sein même des Juifs rapatriés. Il y avait un gros ver dans la pomme, pourrait-on dire.
En effet, tout n'allait pas pour le mieux dans la communauté juive. Alors que les tout premiers colons avaient eu pour objectif la remise en route du culte de l'Éternel, leurs descendants faisaient des affaires. Les plus rusés d'entre eux avaient fait fortune sur le dos de leurs compatriotes qu'ils exploitaient un maximum, les réduisant à la misère noire. En plus de cela, de nombreux autres problèmes d'ordre religieux nécessiteront une intervention musclée de Néhémie. Méthodique et très bien organisé, il va faire les choses dans l'ordre et tout d'abord s'attaquer à la réfection des murailles de Jérusalem. Malgré tous les problèmes qui surgiront, le chantier sera finalement achevé en un temps record de 52 jours.
Une fois les travaux terminés, Néhémie va s'occuper de l'administration du district de Juda. Il prendra des mesures en faveur de la justice sociale et aussi pour assurer la sécurité de Jérusalem. Il fera recenser sa population pour vérifier que tous les habitants de la ville appartiennent bien au peuple d'Israël. Pendant tout son séjour il aura à coeur d'adresser les problèmes spirituels de la communauté juive. Ainsi, la lecture publique de la Loi et son explication au peuple rassemblé susciteront chez les Juifs une prise de conscience aiguë de leurs fautes et un puissant mouvement de renouveau. Ce réveil spirituel débouchera sur un engagement solennel à obéir à la Loi de Moïse et à pourvoir aux besoins financiers du Temple et du culte.
Le texte couvre aussi les mesures prises par Néhémie en faveur du repeuplement de Jérusalem puis la dédicace grandiose de la muraille nouvellement remise en état. Après une absence de plusieurs mois, Néhémie reviendra à Jérusalem pour être à nouveau confronté à de sérieux problèmes qu'il lui faudra encore régler: l'introduction d'étrangers idolâtres dans la communauté et même dans le Temple, les dîmes qui n'étaient pas versées aux lévites, le sabbat qui n'était pas respecté et à nouveau il y avait eu des mariages mixtes entre Israélites et les païens environnants ce qui avait déjà été une faute majeure que le prêtre Esdras avait dû aborder.
Par toutes ses actions, sa dévotion à l'Éternel, et sa façon d'agir face à l'adversité, Néhémie a prouvé la force de son caractère et on comprend mieux pourquoi l'empereur Artaxerxès l'a choisi parmi ses conseillers. C'est lui qui organisa les cérémonies cultuelles qui suivirent la reconstruction des fortifications, qui plaça les Israélites devant leur responsabilité face à la Loi de Moïse et qui fut à l'origine de toutes les autres réformes religieuses. Ces accomplissements montrent à quel point Néhémie désirait du fond du coeur honorer l'Éternel et que ses objectifs avaient avant tout une portée cultuelle et non politique.
Ce n'est pas tout. Esdras et Néhémie étaient non seulement des hommes d'action, mais aussi des Juifs pieux dévoués à la prière. Cette dévotion apparaît fréquemment dans le texte, sous la forme de requêtes au fil de la vie courante ou dans le cadre du culte. Elles peuvent être courtes, voire même éclair, ou bien relativement longues, des expressions de louanges ou de reconnaissance ou encore des demandes de jugement sur les ennemis d'Israël. Un des versets clés pour comprendre aussi bien l'esprit du livre que de son auteur est:
Lorsque j'entendis ces nouvelles, je m'assis et me mis à pleurer. Pendant plusieurs jours, je restai abattu. Je jeûnai et je priai constamment devant le Dieu du ciel (Néhémie 1.4).
Les requêtes faites aussi bien par Esdras que Néhémie sont à titre individuel ou au nom de la communauté. Chacun de ces deux hommes a intercédé pour le peuple en confessant ses péchés, ce qui a débouché sur un engagement d'obéissance de la part des Israélites. Ces prières expriment que Dieu est totalement souverain dans son action, qu'il est présent partout et qu'il répond à ceux qui lui font confiance. Ces prières dans lesquelles on demande l'intervention de Dieu, loin de dispenser leur auteur d'agir, sont au contraire un puissant stimulant à l'action.
Parce qu'ils comptent sur le soutien divin, Esdras et Néhémie se lancent dans la mêlée. Il s'ensuit que la piété conquérante de ces hommes s'accompagne de la réalisation de grands projets au nom de l'Éternel, que ce soit une construction, l'enseignement de la loi, la remise en route du culte, la pureté de la communauté ou la justice sociale. C'est aussi grâce à l'action et à la dévotion de ces deux hommes, chacun en leur temps, que les Israélites se repentirent de leurs fautes et s'engagèrent à obéir à la Loi.
Néhémie était l'échanson d'Artaxerxès, c'est-à-dire un haut fonctionnaire de la cour impériale; il avait un avenir brillant devant lui et aurait pu consacrer toute son énergie à l'avancement de sa carrière. Cependant, après des funérailles royales dignes de son rang, Néhémie serait tombé dans les oubliettes de l'histoire et au mieux son nom serait peut-être apparu sur un papyrus. Mais parce qu'il était pieux et entièrement dévoué à l'Éternel, il a voulu se rendre utile à l'oeuvre de Dieu. Il fut béni et ses réalisations furent phénoménales. En conséquence, aujourd'hui, un des livres des Textes Sacrés porte son nom.
Chapitre 1
Verset 1
Je commence à le lire au chapitre premier.
Histoire de Néhémie, fils de Hakalia. La vingtième année du règne d'Artaxerxès, au mois de Kislev, je me trouvais dans la citadelle de Suse (Néhémie 1.1).
C'est dans la ville de Suse, aujourd'hui en Iran, qu'on a découvert le fameux Code d'Hammourabi exposé au Louvre. Néhémie signifie l'Éternel console et Hakalia veut dire attends-toi à l'Éternel , deux noms typiques de l'époque de l'exil où se trouvait le peuple d'Israël à cause de son idolâtrie maladive. L'histoire commence au milieu du 5e siècle avant J-C, un peu plus de 90 ans après le retour des premiers rapatriés sous la conduite de Zorobabel. Néhémie est alors dans le palais royal sur la partie fortifiée de la ville de Suse, située dans la vallée ensoleillée du fleuve Tigre, et qui était la capitale d'hiver des empereurs perses.
Versets 2-3
Je continue.
Hanani, l'un de mes parents, arriva avec un groupe d'hommes de Juda. Je leur demandai des nouvelles du reste des Juifs revenus d'exil, et de Jérusalem. Ils me répondirent:? Ceux qui ont survécu à la captivité et qui vivent dans le district de Juda se trouvent dans une grande misère et dans une situation très humiliante; il y a des brèches dans la muraille de Jérusalem et ses portes ont été détruites par le feu (Néhémie 1.2-3).
Bien que Néhémie occupait une position très en vue et très enviable auprès de l'empereur, il restait dévoué à sa nation et à l'Éternel. Plus loin dans le texte, et d'après un papyrus découvert à Éléphantine en Égypte, on apprend que Hanani était un frère de Néhémie et qu'il le remplaça comme gouverneur du district de Juda lorsque Néhémie dut retourner en Perse pour quelques mois. Quoi qu'il en soit, les nouvelles du pays sont particulièrement mauvaises; la cause de l'Éternel et de son peuple est en piètre état. Lors de la prise de Jérusalem, les armées de Nabuchodonosor avaient démantelé ses remparts.
Au tout début du règne d'Artaxerxès, le prêtre Esdras avait tenté de les reconstruire, mais les autorités s'y étaient alors opposées. Il semble que plus tard il fut autorisé à les remettre en état, du moins en partie. Mais maintenant, ces fortifications gisent à nouveau à terre, détruites par les ennemis d'Israël. C'est ce que Hanani raconta à Néhémie, lequel fut d'autant plus bouleversé que sachant Esdras à Jérusalem, il avait fondé de grands espoirs sur la présence d'un homme de ce gabarit au milieu des rapatriés. Sans murailles, Jérusalem était en proie aux attaques de ses ennemis.
Verset 4
Je continue.
Lorsque j'entendis ces nouvelles, je m'assis et me mis à pleurer. Pendant plusieurs jours, je restai abattu. Je jeûnai et je priai constamment devant le Dieu du ciel (Néhémie 1.4).
Après la chute de Jérusalem et la destruction du Temple, l'Éternel ne pouvait plus être identifié avec le Temple rasé et sa gloire était retournée dans les cieux. C'est pour cela qu'il est appelé le Dieu du ciel pendant tout le temps de l'exil, époque à laquelle furent écrits les livres d'Esdras, de Néhémie et du prophète Daniel . Aux nouvelles déprimantes de son frère, Néhémie aurait pu répondre avec quelques bonnes platitudes et des clichés du genre: Oh comme c'est bien dommage, je suis vraiment désolé. Excuse-moi, j'ai beaucoup à faire, mais je prierai pour toi et que Dieu te bénisse !
En vérité, il prend les choses très à coeur étant profondément affecté par le sort de Jérusalem. Il fait même une crise d'angoisse tellement ce qu'il apprend lui remue les tripes. Bien que laïque, il se sent tout aussi concerné par le sort de Jérusalem que l'était le prêtre Esdras. Tous deux ont eu la même réaction devant le malheur de la ville. Ils étaient tellement dans la détresse et ont invoqué Dieu avec une telle ferveur qu'ils n'en mangeaient pas.
Le jeûne n'était pourtant obligatoire que pour la fête du Grand Pardon. Cependant, durant l'exil, il était devenu une pratique courante parce que les Juifs se sentaient malheureux loin de leur pays. C'est ainsi que des jeûnes collectifs commémoraient chaque année la chute de Jérusalem et d'autres catastrophes de l'histoire mouvementée d'Israël.
Verset 5
Je continue.
Je suppliai:? Ah ! Éternel, Dieu du ciel, Dieu grand et redoutable, toi qui restes fidèle à ton alliance et qui conserves ta bienveillance à ceux qui t'aiment et qui obéissent à tes commandements (Néhémie 1.5).
Néhémie se rend bien compte qu'il se trouve face à une situation qu'il ne peut résoudre de lui-même. Mais il sait aussi que tout est possible avec l'Éternel, alors il l'invoque de tout son coeur. Le Dieu du ciel grand et redoutable est une référence à sa souveraineté et à sa puissance; il fait ce qu'il veut, quand il veut, comme il veut et où il veut. Néhémie a une vue tout à fait juste de l'Éternel qui inspire une crainte respectueuse, mais qui est aussi bienveillant à l'égard de ceux qui lui sont fidèles.
Versets 6-7
Je continue.
Prête attention à la prière de ton serviteur ! Que tes yeux soient ouverts pour voir que je suis en prière devant toi en ce moment, jour et nuit, pour intercéder en faveur de tes serviteurs les Israélites et pour confesser leurs péchés. Car nous avons péché contre toi. Oui, moi et mon peuple, nous avons péché. Nous sommes vraiment coupables envers toi, car nous avons désobéi aux commandements, aux ordonnances et aux lois que tu as donnés à Moïse, ton serviteur (Néhémie 1.6-7).
Néhémie connaissait bien la Loi de Dieu, c'est pour cela qu'il est conscient des fautes de son peuple. Comme le prophète Daniel presque un siècle auparavant et le prêtre Esdras avant lui, il confesse le péché des Israélites avec lesquels il se sent totalement solidaire, puisqu'à trois reprises il utilise le pronom nous.
Versets 8-11
Je continue.
Souviens-toi, cependant, je te prie, de ces paroles que tu as ordonné à ton serviteur Moïse de prononcer: «Lorsque vous serez infidèles, je vous disperserai parmi les peuples païens. Mais si vous revenez à moi pour obéir à mes commandements et les appliquer, alors, même si vous vous trouvez éloignés jusqu'aux extrémités de la terre, je vous rassemblerai, et je vous ramènerai de là au lieu que j'ai choisi pour y établir ma présence.» Ils sont tes serviteurs et ton peuple, que tu as délivrés par ta grande force et par tes interventions puissantes. Je t'en prie, Seigneur, veuille prêter attention à la prière de ton serviteur et à celle de tes autres serviteurs qui aiment à te vénérer ! De grâce, fais réussir aujourd'hui la démarche que je vais entreprendre et que cet homme m'accueille avec compassion ! Or, à cette époque, j'étais chargé de servir les boissons à la table de l'empereur (Néhémie 1.8-11).
L'office d'échanson était un poste d'honneur et de confiance, et de surcroît très bien payé. Celui qui servait les boissons à la table du roi devait d'abord les goûter pour s'assurer qu'elles n'étaient pas empoisonnées. En effet, la cour de Perse n'était pas exempte d'intrigues. Xerxès, le père de l'empereur actuel, avait été assassiné dans son lit. Bien que haut fonctionnaire de l'empire, Néhémie désire se rendre à Jérusalem pour faire quelque chose.
Dans sa prière d'intercession, il utilise des concepts tirés des écrits de Moïse. Il rappelle à l'Éternel toutes les promesses qu'il avait faites à son peuple. Dieu avait en effet juré de bénir Israël tout en l'avertissant qu'en cas de désobéissance répétée il les chasserait hors de leur pays jusqu'à ce qu'ils se repentent; alors, il les ramènerait de l'exil.
Humainement parlant, seul l'empereur Artaxerxès pouvait autoriser Néhémie à se rendre à Jérusalem. Mais avant de présenter sa requête formelle, il s'adresse au Dieu du ciel qui a tout pouvoir sur quiconque et en tout lieu. La préoccupation et l'intérêt que Néhémie porte aux Juifs revenus en Palestine et à la ville de Jérusalem sont d'autant plus remarquables que, né en exil, il n'a jamais vécu dans le pays de ses ancêtres et il occupe au sein de l'Empire perse une position particulièrement confortable d'un point de vue matériel.
Sa prière témoigne de sa profonde solidarité avec son peuple, ceux en particulier qui de retour en Israël, connaissent une grande détresse et l'humiliation. On constate aussi que cet homme connaissait bien la Loi de Moïse, que sa repentance était sincère et qu'il croyait fermement en la bonté et la souveraineté de son Dieu. La grande entreprise de restauration matérielle et spirituelle qu'il entreprendra est ancrée dans cette prière, elle-même fondée sur la certitude de l'action de l'Éternel en faveur de son peuple. Or ce Dieu n'a pas changé. Il est toujours fidèle à lui-même, ce qui fait que moi aussi je peux compter sur lui.
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